15 août 2012, de retour à terre. « Si le paradis est réservé à ceux qui ont contemplé la beauté du monde, il était sûr de sa place. »

J’ai lu cette phrase* pendant notre croisière dans les îles anglo-normandes, à bord du petit trimaran jaune de Voiles et Voiliers. Je l’ai lue et j’ai eu la chance de m’y reconnaître.

Julien le photographe, Paul l’ami-skipper et moi avons embarqué ensemble pour préparer un article pour le magazine. 10 jours de vadrouille autour de Guernesey et d’Herm en cramant, en rigolant, en découvrant les escales et les personnages locaux. J’ai pris des notes sur la qualité des bières et des burgers tout autour des îles mais je n’ai pas encore écrit grand chose.

Tout est dans ma tête. Je revois ces mouillages à la magie insoupçonnée, cette baie rocailleuse traversée pleine balle sous spi, ce phare qui se découpait à contre-jour. Je revois les ty punchs au coucher du soleil et le barbecue dévoré sur une crique mi-Corse mi-fjord. Je replonge dans l’eau fraiche (Paul dira glacée), je revis les pointes à 15 nœuds (Paul dira 16). Je repense aux trajets de nuit dans l’annexe, entre les barques de pêche, avec une lampe frontale et le plancton que Julien agitait au bout des rames comme seuls guides.

On a laissé très loin nos quotidiens respectifs, on a répété mille fois les mêmes blagues en continuant d’en rire. Chaque jour, Julien craignait les brigades du kiff qui arrêtent ceux qui vivent leur chance à fond … Chaque jour, c’était un nouveau fou rire. Il y a eu peu de silence mais beaucoup de contemplation.

« Si le paradis est réservé à ceux qui ont contemplé la beauté du monde, il était sûr de sa place. » Ce soir, je suis sûre de la mienne.

*Sylvain Tesson, Une vie à coucher dehors, Folio.